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2005 : Oncle Tam

vendredi 25 juillet 2014, par Sylvie Terrier

Oncle Tam est un mélange de métèque et de vieux sage. La barbichette clairsemée, de longs cheveux au vent, il a la soixantaine alerte et déborde d’énergie. Chez lui des tableaux et des livres. On entre dans son atelier comme dans un aquarium, on flotte dans la couleur de grandes aquarelles.

Chez Oncle Tam, il faut prendre le temps. L ’écouter raconter sa vie ou plutôt relier ce qu’il vous donne car l ’homme parle peu.

Il me tend un vieux dossier, un journal de route et j ’ai du mal à reconnaître dans ce jeune homme aux traits ronds le vieil homme d’aujourd’hui. Son premier tour du monde. Ses expositions au Pérou. Les coupures de journaux parlent de lui, ce jeune malais de vingt ans qui s ’est lancé, seul, dans l ’aventure.

Les aquarelles flottent, on reconnaît soudain les chapeaux ronds des femmes péruviennes et dans la forme d’une arabesque, un mouvement de jupe.

Oncle Tam vit à Malacca depuis une dizaine d’années. Ce sont ses grands-parents qui ont quitté la Chine pour la Malaisie. Dans la famille Tam, personne n ’est croyant. Un jour, toute la famille s ’est trouvée réunie autour de la table. Trois générations, les deux fils, le couple parental, les beaux-parents. Ce jour là, ils ont décidé de vivre ensemble sous le même toit, à Malacca. Dans une grande maison qui servirait à la fois d’atelier, de galerie d’exposition et de maison d’habitation. Avec comme point commun la pratique de l’autonomie et l’objectif de ne dépendre de personne.

L ’aîné est parti étudier I ’informatique aux Etats Unis, le plus jeune est resté à la maison, dans l ’ombre. Il taille des sceaux et se passionne pour les mangas qu ’il copie avec un certain talent.

Oncle Tam peint sans relâche. Des aquarelles toujours plus grandes, toujours plus abstraites. Le mouvement et l ’énergie plutôt que la représentation des choses ou des êtres. La force vitale du monde. La croissance et la vie. Le souffle.

Dans son jardin, il observe la floraison du jasmin, associe pierres et bois, accroche une clématite le long d’un mur de brique. Rien n ’est laissé au hasard. Son jardin est un haïku, une goutte d’éternité. Il faut s ’asseoir et observer. L ’écouter raconter, car la nature l ’inspire. S’émerveiller avec lui de I ’ingéniosité des plantes.

Entrer en poésie.

Oncle Tam est bon avec moi, il m’offre sa connaissance, des fruits, un verre d’eau fraîche. Derrière nous, les carillons de métal sonnent dans le vent léger.

Sur les murs, les couleurs dansent.